Blog de Me Antoine BON, Avocat, Strasbourg. Informations et débats autour du droit du travail : réglementation, embauche, exécution, conditions de travail, santé au travail, harcèlement, salaire, temps de travail, heures supplémentaires, licenciement, prise d'acte de la rupture du contrat de travail, contrats précaires, CDD, CDI, intérim, requalification, procédure prud'hommale... 5 allée d'Helsinki 67300 SCHILTIGHEIM - 03 90 20 81 40

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lundi, 4 mars 2013

Des faits commis par l'employeur en dehors du temps de travail peuvent justifier la prise d'acte de la rupture du contrat de travail

Cour de cassation - chambre sociale - 23 janvier 2013

Une salariée en arrêt de travail depuis un jour se rendait à une leçon de bridge à son club. Informé de sa présence, son employeur s'y rendit pour lui exposer ses doutes sur la réalité de cet arrêt de travail qui lui permettait de continuer à s'adonner à sa passion pour les cartes mais pas à ses obligations professionnelles. L'employeur exposa si vertement et en public ses observations, que la salariée en fut choquée et sidérée, nécessitant l'intervention de l'assistance.

La Cour d'appel et la Cour de cassation approuvent la salariée d'avoir pris acte de la rupture de son contrat de travail à raison de ces faits.

L'intérêt de l'arrêt est d'admettre qu'un salarié puisse prendre acte de la rupture du contrat à raison de faits commis en dehors du temps et du lieu de travail.

En l'occurrence il existait un lien avec le contrat de travail puisque l'irruption de l'employeur dans le club de bridge était en rapport avec l'arrêt de travail de la salariée.

On peut se poser la question de savoir si, de même que le licenciement d'un salarié peut intervenir à raison de faits commis au cours de la vie privée du salarié s'ils ont un retentissement sur la vie de l'entreprise, les faits qui fondent la prise d'acte de la rupture doivent nécessairement avoir un lien avec le contrat de travail.

je vous recommande à ce titre la lecture du commentaire bien plus détaillé de Me MOUROT.

lundi, 14 mai 2012

Salarié drogué... Salarié viré !

Cour de cassation - chambre sociale - 27 mars 2012

Cet arrêt est intéressant en ce qu'il tente de tracer la limite entre les comportements du salarié qui relèvent de sa vie privée sur lesquels l'employeur n'a pas prise et les comportements soumis au contrôle et à la sanction de l'employeur.

En l'espèce la Cour de cassation devait trancher du problème d'un personnel naviguant commercial (les fameux "PNC aux portes" des annonces de décollage)licencié après avoir consommé de la drogue pendant une escale entre deux vols longs courriers.

La Cour de cassation approuve le licenciement car si l'on ne peut reprocher au salarié son comportement pendant l'escale qui relève de sa vie privée, il est tout à fait légitime de reprocher au salarié "qui appartenait au personnel critique pour la sécurité" de se présenter au travail sous l'influence de stupéfiants faisant ainsi courir un risque aux passagers ce qui constitue une faute grave.

Ainsi la consommation de drogue dans le cadre de la vie privée demeure étrangère au droit du travail, tant que les effets de celles-ci ne se font plus ressentir une fois arrivé au travail, au delà elle constitue une faute qui peut même être qualifiée de faute grave dans certains cas comme celui du salarié de cet arrêt.

lundi, 7 mai 2012

L'échange de mails personnels ne peut entraîner de sanction disciplinaire

Cour de cassation - chambre sociale - 26 janvier 2012

Dans cet arrêt il est question d'un salarié licencié pour avoir envoyé à un collègue un faux CV moquant sa supérieur hiérarchique, qui bien que désignée sous un faux nom était clairement désignée comme objet de la moquerie.

La Cour d'appel avait approuvé le licenciement au motif que le courriel litigieux n'était pas étranger à l'activité professionnelle du salarié puisqu'il mettait en scène sa supérieure hiérarchique et qu'il avait été envoyé à un autre salarié de l'entreprise sans requérir de sa part une attitude de discrétion, si bien que son auteur était responsable du trouble manifeste que ce "factum" avait causé dans l'entreprise, et que l'intempérance démesurée des propos excédait largement ce qu'autorise la liberté d'expression et de critique reconnue à un salarié et caractérisait un manquement particulièrement indélicat à l'obligation professionnelle de loyauté, comportement d'autant moins admissible qu'il émanait d'un cadre porteur de l'image et du crédit de l'entreprise.

La Cour de cassation refuse de suivre le raisonnement des juges d'appel au motif que l'envoi du courriel litigieux par le salarié, de sa messagerie personnelle et en dehors du temps et du lieu de travail, à l'adresse électronique personnelle d'un collègue de travail, ce qui conférait à ce message un caractère purement privé, ne constituait pas un manquement à son obligation de loyauté envers son employeur.

La Cour rappelle ainsi que le salarié est dégagé dans le cadre de sa vie privée d'une obligation de loyauté qui l'obligerait à dire en permanence du bien de son employeur.

Les soirées amicales entre collègues demeurent donc préservées de l'ingérence possible du pouvoir disciplinaire de l'employeur...

mercredi, 30 novembre 2011

La vie privée s'arrête là ou commence le harcèlement sexuel

Cour de cassation − chambre sociale − 19 octobre 2011

Surprenante sur le plan des principes, malgré tout logique sur le plan des faits, la solution dégagée par cet arrêt mérite examen.

Un salarié avait tenu des propos à caractère sexuel à deux de ses collègues féminines lors de l'envoi de messages électroniques hors du temps et du lieu de travail, sur MSN entre 12 heures et 13 heures 30, puisqu'il travaille de 15 heures à 23 heures ou lors de soirées organisées après le travail, et, d'autre part, avait, sur son lieu de travail, fait des réflexions déplacées à une autre salariée sur son physique et suivi une troisième dans les toilettes.

La Cour d'appel avait considéré que le licenciement basé sur ces faits était dépourvu de cause réelle et sérieuse. Elle avait en effet considéré que les faits commis hors de son temps de travail relevaient de sa vie privée et que les seuls faits commis aux temps et lieux de travail n'étaient pas suffisant pour légitimer la rupture du contrat de travail.

La Cour de cassation ne l'a pas suivi dans son raisonnement très juridique.

Elle considère au contraire que les relations que pouvait entretenir le salarié avec des personnes avec lesquelles il n'était en relation qu'à raison de son travail ne relèvent pas de la vie privée mais de la vie professionnelle.

La Cour dans cet arrêt esquisse l'abandon d'une définition de la vie professionnelle cantonnée au temps et lieu de travail pour aller vers une définition englobant les relations nouées à l'occasion de la vie professionnelle. Elle tente ainsi de s'adapter à la réalité de l'évolution du monde du travail salarié pour lequel, dans de nombreux secteurs, les horaires et lieux de travail deviennent plus flous au profit d'une communauté de travail. Cette évolution pourrait s'expliquer par la combinaison des modifications des méthodes de management et l'utilisation de plus en plus massive des outils de communication dématérialisée (MSN, Facebook...).

lundi, 3 octobre 2011

Preuve de la reprise d'ancienneté

Cour de cassation - chambre sociale - 21 septembre 2011

Un employé de maison d'un chateau s'est vu licencié pour avoir colporté des rumeurs désobligeantes sur la vie privée du dirigeant de la société qui l'emploie à un ancien dirigeant en conflit avec celle-ci.

La Cour de cassation approuve le licenciement au motif qu'en agissant ainsi le salarié avait abusé de sa liberté d'expression.

Elle casse cependant l'arrêt de la Cour d'appel s'agissant d'une réclamation liée à l'ancienneté du salarié. Elle reproche à la Cour d'avoir refusé la reprise d'ancienneté en l'absence de mention dans son contrat de travail.

Elle rappelle en effet que la mention de l'ancienneté du salarié dans son bulletin de paie vaut présomption de reprise de cette ancienneté. Cette présomption ne peut être renversée que si l'employeur rapporte la preuve contraire.

En l'espèce l'absence de mention de la reprise dans le contrat de travail ne peut constituer une telle preuve.

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