Blog de Me Antoine BON, Avocat, Strasbourg. Informations et débats autour du droit du travail : réglementation, embauche, exécution, conditions de travail, santé au travail, harcèlement, salaire, temps de travail, heures supplémentaires, licenciement, prise d'acte de la rupture du contrat de travail, contrats précaires, CDD, CDI, intérim, requalification, procédure prud'hommale... 5 allée d'Helsinki 67300 SCHILTIGHEIM - 03 90 20 81 40

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lundi, 6 septembre 2021

Sanction disciplinaire : le supérieur hiérarchique est considéré comme l'employeur pour déterminer la prescription

Cour de cassation, Chambre sociale, 23 juin 2021, n° 19-24.020 Cour de cassation, Chambre sociale, 23 juin 2021, n° 20-13.762

Ces arrêts viennent préciser un point très important du régime des mesures disciplinaires prises par l'employeur.

En effet, pour pouvoir sanctionner une faute, l'employeur est tenu d'engager la procédure disciplinaire dans les deux mois de la connaissance qu'il a eu des faits.

Dans le cas de faits constatés par d'autres salariés puis relayés à la direction, à quel moment doit-on se placer pour apprécier le respect de ce délai ?

Dans ces espèces l'employeur considérait que le délai ne commencait à courir qu'à compter de l'information de la direction, les salarié-e-s, considérant qu'il convenait de retenir la connaissance par tout salarié d'un niveau hiérarchique supérieur au sien.

Dans ces deux arrêts, la Cour de cassation tranche en considérant qu'il convient de retenir la date où le supérieur hiérarchique était informé des faits.

Il convient donc aux employeurs de faire très attention à ce point qui peut remettre en cause toute sanction intervenue plus de deux mois après cette connaissance, et qui blanchit même les salarié-e-s de toute sanction si une sanction est intervenue, pour d'autres faits, après qu'un supérieur hiérarchique ait été informé des faits non-sanctionnés.

vendredi, 13 août 2021

Une faute prescrite peut justifier la résiliation du contrat aux torts de l'employeur

Cour de cassation, Chambre sociale, 30 juin 2021

Depuis quelques années, le législateur n'a eu de cesse que de réduire le délai de prescription des demandes liées au contrat de travail, au point d'aboutir à un régime plus défavorable que celui du droit commun.

Ce sort particulier fait aux droits des salariés s'expliquerait par la nécessité de prévisibilité de l'action économique et l'engorgement des juridictions.

La situation est devenue si moralement difficile à soutenir que la Cour de cassation vient de rendre un curieux arrêt : un salarié placé en arrêt maladie par son médecin pendant près de 3 ans avait saisi le Conseil de Prud'hommes d'une demande de résiliation judiciaire et d'indemnisation sur la base des manquements de l'employeur qu'il considérait être à l'origine de son arrêt de travail.

La Cour d'appel, appliquant les dispositions législatives, avait débouté la salariée de l'ensemble de ses demandes. Saisie par la salariée, la Cour de cassation confirme la prescription de ses demandes indemnitaires mais considère que les manquements, même prescrits, devaient être examinés par la Cour d'Appel pour apprécier la demande de résiliation judiciaire.

Ainsi, sans le dire explicitement, la Cour ouvre la possibilité aux juges de rompre le contrat de travail aux torts de l'employeur sur la base de faits prescrits et ne pouvant donner lieu à indemnisation.

Il est difficile d'imaginer qu'une solution aussi bancale sur le plan juridique pourrait se maintenir longtemps. Elle illustre cependant la situation kafkaienne créée par les réformes successives du droit du travail qui placent les salariés dans une situation de justiciables de seconde zone et le manque total de réflexion du législateur sur le sens et l'effet des réformes qu'il met en place.

Il convient désormais d'attendre soit qu'à l'instar de la jurisprudence sur les plafonds d'indemnisation "Macron", les juges rééquilibrent le régime mis en place par le législateur, soit que ce dernier ose se saisir du problème. Si la première solution est la plus probable, elle ouvre cependant une longue période d'incertitude sur le régime de la prescription en droit du travail qui n'est souhaitable ni pour les employeurs, ni pour les salariés.

lundi, 28 octobre 2019

Requalification des contrats précaires : attention à la prescription !

Cour de cassation - chambre sociale - 3 mai 2018

Cet arrêt permet d'illustrer les profondes mutations du droit du travail résultant des modifications successives de la législation et notamment la réduction des prescriptions en la matière.

Il est loin le temps où le salarié auquel l'employeur a recouru par des contrats précaires irréguliers disposait de dix ans à l'issue du dernier de ces contrats précaires pour demander réparation du préjudice subi.

Pour la Cour de cassation, le salarié ne dispose désormais plus que de deux années pour demander la requalification de son contrat précaire en contrat à durée indéterminée, à compter de la conclusion du premier contrat irrégulier.

Ainsi le salarié qui enchaîne les contrats précaires, tous viciés d'une même irrégularité (par exemple, parce qu’il a été conclu pour un motif interdit), ne pourra plus s'en plaindre une fois la deuxième année de relation précaire achevée.

Si la solution retenue permet de sécuriser les employeurs au bout de deux ans, elle aboutit à rendre incontestables des situations pourtant objectivement illégales et ce, au détriment des salariés précaires.

lundi, 30 mars 2015

Comment concilier rupture conventionnelle et procédure de licenciement

Cour de cassation - chambre sociale - 3 mars 2015 - N° de pourvoi: 13-20549 Cour de cassation - chambre sociale - 3 mars 2015- N° de pourvoi: 13-20.549 Cour de cassation - chambre sociale - 3 mars 2015 - N° de pourvoi: 13-23.348

Le succès de la rupture conventionnelle masque le fait qu'elle est souvent une solution alternative au licenciement envisagé par l'employeur.

La procédure de rupture conventionnelle prenant un temps certain (environ un mois et demi), la question se pose de savoir comment coordonner une procédure de licenciement envisagée et sa substitution avec une rupture conventionnelle.

La chambre sociale de la Cour de cassation nous donne, à l'occasion de ces trois arrêts, plusieurs précisions :

  1. La rupture conventionnelle peut être conclue même après la notification du licenciement

Elle vaut alors rétractation du licenciement et renonciation des parties.

Cette solution est particulièrement novatrice et pose de multiples questions pratiques.

On n'imagine d'ailleurs mal quel avantage la conclusion d'une telle rupture conventionnelle peut avoir par rapport à la signature d'une transaction.

  1. Le licenciement d'un salarié après rétractation d'une rupture conventionnelle est valable

Si le salarié se rétracte, la Cour de cassation ne voit pas d'objection à ce que l'employeur engage une procédure de licenciement.

Cependant...

  1. La rupture conventionnelle n'interrompt pas le délai de prescription

Dès lors l'engagement d'une procédure disciplinaire suite à rétractation du salarié risque de se heurter à la prescription disciplinaire de 2 mois qui court à compter de la découverte des faits et n'est pas interrompue par la procédure de rupture conventionnelle.

mercredi, 31 juillet 2013

La prescription se réduit comme peau de chagrin

Loi de sécurisation de l'emploi, article 21

Une des nombreuses modifications apportées par la loi de sécurisation de l'emploi (validation législative de l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013) au code du travail est la création d'une section du code du travail relative à la prescription. Il y est décidé que désormais la prescription des ruptures de contrats de travail seront soumises à une prescription de deux ans.

De 2007 aujourdh'ui, la prescription du licenciement est ainsi passé de 30 à 2 ans.

L'action en prescription des salaires est, pour sa part réduite à trois ans (elle était antérieurement de cinq ans).

C'est ainsi un nombre considérable d'action qui seront prescrites dans 2 ans puis trois ans.

S'il faut saluer la réduction de la prescription en matière de contestation de licenciement, car on ne voyait pas l'intérêt d'un délai de prescription très élevé, il est à craindre que la prescription triennale sur les salaires n'aboutisse finalement qu'à priver les salariés qui n'ont pas protestés pendant l'exécution de leur contrat de travail de tout droit de réclamation postérieur.

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