Blog de Me Antoine BON, Avocat, Strasbourg. Informations et débats autour du droit du travail : réglementation, embauche, exécution, conditions de travail, santé au travail, harcèlement, salaire, temps de travail, heures supplémentaires, licenciement, prise d'acte de la rupture du contrat de travail, contrats précaires, CDD, CDI, intérim, requalification, procédure prud'hommale... 5 allée d'Helsinki 67300 SCHILTIGHEIM - 03 90 20 81 40

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Mot-clé - pouvoir disciplinaire

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mercredi, 28 novembre 2018

Les livreurs auto-entrepreneurs de la nouvelle économie sont des salariés qui s'ignorent

Cour de cassation - Chambre sociale - 28 novembre 2018

Cet arrêt était très attendu car il statue enfin sur le statut des livreurs qui contractent avec une plateforme numérique afin que celle-ci leur fournisse des commandes à livrer à leurs clients.

Ces livreurs concluent des contrats de prestations de services et sont souvent déclarés en qualité d'auto-entrepreneur.

La Cour de cassation n'entend cependant pas en rester à la qualification donnée par les parties à leur relation de travail.

Elle rappelle que l’existence d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité des travailleurs.

Ainsi, le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

La Cour de cassation considère que si les juges constatent d’une part, que la plateforme numérique est dotée d’un système de géolocalisation permettant le suivi en temps réel par la société de la position du coursier et la comptabilisation du nombre total de kilomètres parcourus par celui-ci et, d’autre part, que la société dispose d’un pouvoir de sanction à l’égard du coursier, ils ne peuvent refuser que le contrat soit requalifié en contrat de travail.

Les conséquences d'une telle requalification peuvent être multiples (sans être exhaustif) :

  • garantie de salaire horaire minimum
  • garantie de temps de travail constant
  • droit au paiement d'heures supplémentaires
  • congés payés
  • affiliation à la sécurité sociale et aux protections complémentaires obligatoires
  • protection contre les accidents du travail
  • indemnisation des maladies
  • protection contre le licenciement

C'est un imposant pavé dans la mare de la nouvelle économie que jette ici la Cour de cassation et il faut saluer un certain courage à défendre le statut des salariés à l'heure de sa déconstruction par les gouvernements successifs.

mardi, 4 avril 2017

Un règlement intérieur c'est bien, un règlement intérieur régulier, c'est mieux

Cour de cassation - Chambre sociale - 6 mars 2017

Par cet arrêt, la Cour de cassation impose aux juridictions du fond de vérifier l'applicabilité du règlement intérieur pour qu'il puisse produire ses effets.

Ainsi il casse un arrêt de Cour d'appel pour avoir validé une mise à pied sur la base d'un règlement intérieur dont elle n'avait pas recherché s'il avait été communiqué à l'inspecteur du travail accompagné de l'avis du comité d'entreprise, ou à défaut des délégués du personnel, conformément aux dispositions de l'article L. 1321-4 du code du travail .

vendredi, 19 août 2011

Fichiers informatiques et vie personnelle

Cour de cassation - chambre sociale - 5 juillet 2011

La Chambre sociale est en train de construire sa jurisprudence relative aux fichiers informatiques créés ou échangés par les salariés avec les moyens de l'entreprise.

Après avoir défini les fichiers personnels qui demeurent hors de la portée du contrôle de l'employeur, la chambre sociale pose des limites aux conséquences que peut tirer l'employeur des fichiers "non-personnels".

Dans cet arrêt elle s'intéresse au licenciement d'un salarié dont l'employeur a découvert sur sa messagerie professionnelle des messages érotiques adressée par une autre salariée de l'entreprise et des échanges intimes avec cette dernière.

La Cour de cassation approuve la Cour d'appel d'avoir déclaré le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse pour les motifs suivants :

"Mais attendu que le salarié a droit, même au temps et au lieu du travail, au respect de l'intimité de sa vie privée ; que si l'employeur peut toujours consulter les fichiers qui n'ont pas été identifiés comme personnels par le salarié, il ne peut les utiliser pour le sanctionner s'ils s'avèrent relever de sa vie privée ;

Et attendu que la cour d'appel, qui a relevé que les messages d'ordre privé échangés par le salarié avec une collègue de l'entreprise étaient pour la plupart à l'initiative de celle-ci, notamment celui contenant en pièce jointe non identifiée des photos érotiques, et que l'intéressé s'était contenté de les conserver dans sa boîte de messagerie sans les enregistrer ni les diffuser, a, nonobstant le motif erroné critiqué par les deux premières branches et répondant ainsi à la recherche prétendument omise, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ";

La Cour pose ainsi en limite au pouvoir de sanction de l'employeur le droit au respect de sa vie privée par le salarié. La Cour semble cependant poser en condition de cette exonération, le caractère relativement passif du salarié qui n'a fait que conserver les mails reçus et n'a répondu qu'à son expéditrice.

Reste à savoir comment la Cour de cassation appliquera cette jurisprudence à d'autres faits moins simples, comme par exemple la fameuse affaire des licenciement pour des propos tenus sur facebook qui n'ont pour l'instant pas été soumis à son appréciation....

vendredi, 17 décembre 2010

Sanction disciplinaire : source de la mesure

Cour de cassation - chambre sociale - 26 octobre 2010

Dans cet arrêt la chambre sociale précise qu'une mise à pied ne peut être valablement prononcée qu'à condition que cette mesure soit prévue par le règlement intérieur et que ce dernier en prévoit la durée maximale.

Il convient de rappeler que dans les entreprises de 20 salariés et plus, l'article L 1311-2 du code du travail prévoit qu'un règlement intérieur est obligatoire. Dès lors toute mise à pied décidée hors des prévision du règlement intérieur encourt l'annulation.

vendredi, 19 novembre 2010

Attention aux mails d'avertissement...

Cour de cassation - chambre sociale - 26 mai 2010

Par cet arrêt, la Cour de cassation rappelle que le pouvoir disciplinaire de l'employeur s'épuise à la première mesure disciplinaire prise suite aux faits.

En l'espèce la Cour constatant que, dans son message électronique du 26 juillet 2004, l'employeur adressait divers reproches à la salariée et l'invitait de façon impérative à un changement radical, avec mise au point ultérieure au mois d'août, la cour d'appel a justement décidé que cette lettre sanctionnait un comportement fautif et constituait un avertissement, en sorte que les mêmes faits ne pouvaient plus justifier le licenciement.

Dès lors un licenciement prononcé pour le seul motif d'un fait ayant fait l'objet d'un courriel de reproche est dépourvu de cause réelle et sérieuse.