Blog de Me Antoine BON, Avocat, Strasbourg. Informations et débats autour du droit du travail : réglementation, embauche, exécution, conditions de travail, santé au travail, harcèlement, salaire, temps de travail, heures supplémentaires, licenciement, prise d'acte de la rupture du contrat de travail, contrats précaires, CDD, CDI, intérim, requalification, procédure prud'hommale... 5 allée d'Helsinki 67300 SCHILTIGHEIM - 03 90 20 81 40

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Mot-clé - obligation de sécurité

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samedi, 21 mars 2020

COVID 19 - CORONAVIRUS et protection de la santé au travail

Ces dernières années, la jurisprudence de la Cour de cassation s'est attachée à défendre la santé des salariés en précisant le domaine de l'obligation de sécurité pesant sur l'employeur.

Cette construction jurisprudentielle s'est également construite autour de la notion de faute inexcusable, qui permet de rechercher la responsabilité de l'employeur suite à un accident du travail ou une maladie professionnelle.

Ainsi, le droit actuel met à la charge de l'employeur une obligation de tout mettre en oeuvre pour protéger la santé de ses salariés, l'exposant, en cas de manquement, soit à prendre à sa charge toutes les conséquences de l'accident du travail, soit à indemniser directement le salarié lorsque le préjudice subi ne relève pas de ce régime.

L'irruption de la pandémie de COVID 19 dans les relations de travail pose la question de l'adaptation de ces notions à cette situation.

A ma connaissance ces régimes n'ont jamais été appliqués à la situation d'une pandémie virale.

On trouve cependant des indices du raisonnement tenu par les juges de la Cour de cassation dans des situations similaires comme les maladies professionnelles liées à l'amiante, et dans un cas de contamination VIH par seringue.

Un arrêt récent rendu par la Cour d'Appel de Grenoble le 20 février 2020 a reconnu la faute inexcusable de l'employeur lors de l'infection par turberculose pulmonaire d'une auxiliaire de vie sociale mise en contact d'un malade sans information ni protection.

Pour résumer, il est aujourd'hui assez solidement établi en jurisprudence qu'un salarié qui aurait contracté le virus du COVID à l'occasion de son activité salariée doit pouvoir voir son affection prise en charge au titre d'un accident du travail (si une contamination accidentelle peut être mise en évidence) ou éventuellement comme maladie professionnelle suite à une expertise individuelle (la maladie ne figurant pas au tableau, ce qui rend exceptionnelle cette reconnaissance individuelle).

Si la maladie est reconnue comme un accident de travail, outre un régime d'indemnisation plus favorable et quelques protections contre la rupture du contrat de travail), le salarié pourra également chercher une indemnisation complémentaire pour ses préjudices non couverts par le régime d'assurance maladie en invoquant la faute inexcusable de l'employeur.

Cette faute serait constitué par l'absence de mise en oeuvre par l'employeur des mesures nécessaire à réduire ou écarter le risque de contamination de ses salariés.

Il conviendra pour l'employeur de démontrer qu'il a appliqué l'ensemble des recommandations applicables au moment des faits.

Il n'est cependant pas certain que cette démonstration suffise, dès lors que, pour la jurisprudence, les obligations de l'employeur ne s'arrêtent pas au respect de la réglementation expresse en vigueur. Les juges ont, sur ce point, un pouvoir souverain d'appréciation. On ne pourra qu'inciter les employeurs à la plus grande prudence dès lors que cette appréciation sera portée plusieurs années après l'épidémie et que nul ne peut prédire la façon dont seront jugées la pertinence des recommandations gouvernementales avec le recul.

C'est le même raisonnement qui sera tenu par les juges en cas d'action visant à engager directement la responsabilité de l'employeur sur la base de son obligation de sécurité résultat, même en l'absence de reconnaissance du caractère professionnel de l'accident ou de la maladie.

Il peut également être intéressant de signaler que c'est un des rares domaines où certains employeurs disposent d'une assurance contre les conséquences de ce type d'actions en responsabilité, alors que pour quasiment l'ensemble des conséquences de la pandémie actuelle sera exclue des garanties des assureurs (au titre de l'exclusion quasi générale des faits de guerre et catastrophes naturelles).

En tout état de cause, ces régimes de responsabilités sont très intimement liés à la possibilité de rapporter la preuve de l'origine de la contagion et du lien de celle-ci avec ses conditions de travail, ce qui demeure toujours un point particulièrement délicat.

Les analyses divergent d'ailleurs selon l'endroit d'où elles émanent : Je vous recommande de consulter successivement la fiche concernant la question sur le site du MEDEF et celle sur le site mis en place par la CGT.

jeudi, 22 septembre 2011

Licenciement d'une salariée pour avoir mal réagi à son harcèlement...

Cour de cassation - chambre sociale - 29 Juin 2011

Dans cet arrêt une salariée, après avoir subi de nombreux mois de harcèlement avait fait l'objet d'un licenciement pour faute à raison de son attitude agressive vis à vis de ses collègues de travail.

La Cour de cassation considère qu'une fois le harcèlement établi, l'employeur ne peut sanctionner la salariée à raison de son comportement si celui-ci était réactif au harcèlement moral qu'elle subissait.

vendredi, 1 avril 2011

Harcèlement moral par un tiers à l'entreprise

Cour de cassation - chambre sociale - 1 mars 2011

Cet arrêt illustre le refus de la Chambre sociale de la Cour de cassation de se tenir à une lecture trop restrictive des dispositions relatives au harcèlement moral.

En l'espèce l'employeur, soutenu par la Cour d'appel, prétendait ne pouvoir être condamné sur la base du harcèlement car celui-ci n'émanait pas d'un salarié de l'entreprise mais d'un consultant extérieur.

La Cour de cassation considère que nonobstant l'absence de lien de subordination avec la société employeur de la victime, le consultant, chargé de former les salariés, disposait d'une autorité de fait sur les salariés en accord avec l'employeur.

La Cour prend soin de préciser que la responsabilité de l'employeur à raison du harcèlement ne trouve pas sa source dans son implication directe ou sa faute mais dans l'obligation de sécurité résultat qui pèse sur lui.

lundi, 10 mai 2010

L'employeur doit protéger le salarié des conséquences psychologiques d'une réorganisation

Cour de cassation - chambre sociale - 17 février 2010

Dans cet arrêt la Cour de cassation s'intéresse au cas particulier d'une salariée mise en arrêt maladie après un entretien individuel s'étant mal déroulé et concluant une réorganisation de la société au cours de laquelle la salariée avait rencontré des difficultés que son employeur s'était refusé à résoudre.

L'intérêt de cet arrêt est qu'il n'a pas été rendu sur le visa du harcèlement, qui semblait ne pas être constitué en l'espèce.

En revanche la Cour de cassation approuve la Cour d'appel d'avoir alloué 30 000 € d'indemnité en réparation du préjudice subi à raison du manquement à son obligation de sécurité résultat tel que prévu à l'article L 4121-1 du code du travail.

Ainsi indépendamment de tout harcèlement, le seul fait de ne pas avoir apporté de réponse au difficultés que la salariée avait porté à la connaissance de son employeur à raison de la restructuration en cours dans l'entreprise, engage sa responsabilité quant aux conséquences psychologiques subies par la salariée.

Cette indemnité s'ajoute aux indemnités de rupture sans cause réelle et sérieuse auxquelles l'employeur a été condamné à raison de son manquement à son obligation de reclassement.

mercredi, 23 septembre 2009

Inaptitude et obligation de sécurité de l'employeur

Par un arrêt rendu le 24 juin 2009, la Cour de cassation vient de confirmer l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles du 15 janvier 2008 qui a déclaré le licenciement d'une salariée inapte dépourvu de cause réelle et sérieuse et a condamné l'employeur à l'indemniser.

Cet arrêt mérite attention car il précise qu'après avoir relevé que l'employeur n'avait pas veillé, entre 1999 et 2001, à faire subir les examens médicaux annuels obligatoires, la cour d'appel a constaté, d'une part qu'il avait placé la salariée, présentant des signes apparents de décompensation anxio-dépressive, dans une situation difficile en lui demandant d'effectuer, en plus de ses tâches et dans un climat social tendu, la comptabilité dégradée d'une autre association avec des suspicions de malversation et qu'il en était résulté une angoisse professionnelle accrue avec troubles, d'autre part que les relations de la salariée avec son supérieur avaient aggravé la pathologie de celle-ci.

La Cour de cassation approuve la Cour d'appel d'avoir ainsi caractérisé l'existence de mesures ayant eu pour objet ou pour effet de compromettre la santé de la salariée,en application des articles L. 4121-1, L. 4121-2 et L. 4121-4 du code du travail.

Ainsi, sans même invoquer les dispositions relatives au harcèlement, la Cour considère que l'employeur informé de la fragilité d'un salarié se doit de prendre toute mesure pour éviter la dégradation de son état sans attendre que celui-ci devienne inapte et surtout en s'abstenant de toute mesure propre à aggraver cet état.