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lundi, 3 décembre 2018

Cinq ans d'heures de travail non payées ne suffisent pas à motiver la rupture du contrat par le salarié

Cour de cassation - chambre sociale - 14 novembre 2018

Cet arrêt illustre la tendance constatée depuis plusieurs années au sein de la jurisprudence de la Cour de cassation visant à restreindre le plus possible le domaine de la prise d'acte du contrat de travail.

Cette technique, pourtant inventée par la jurisprudence, permettait au salarié confronté à un comportement fautif de son employeur de rompre son contrat de travail unilatéralement. Les juges, saisis des conséquences de cette rupture, doivent alors arbitrer entre la qualification de démission ou de licenciement sans cause réelle et sérieuse; selon que les manquements à l'origine de la rupture pouvaient ou non être prouvés par le salarié.

Le premier frein à cette possibilité pour le salarié de rompre ainsi son contrat aux torts de l'employeur vint de Pole emploi. L'organisme considère, en effet que le salarié doit être considéré, au regard des prestations sociales, comme un salarié démissionnaire.

La jurisprudence a, ensuite, ajouté une condition à la possibilité de qualifier la rupture comme imputable à l'employeur en exigeant que la faute de l'employeur soit d'une gravité suffisante.

Sans aucun repère objectif, les salariés et employeurs se trouvaient ainsi entièrement aux mains de l'appréciation souveraine des juges du fond quant à la définition de la gravité suffisant à passer d'une rupture ayant les effets d'une démission à celle ayant les conséquences d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La Cour de cassation a alors rendu régulièrement des arrêts visant à tracer cette limite.

Force est de constater que le territoire de la faute justifiant que la rupture soit considérée comme ayant les conséquences d'une rupture sans cause réelle et sérieuse n'a cessé de se restreindre.

Les salariés confrontés à ces situations doivent donc réfléchir à deux fois avant de prendre une décision unilatérale irréversible...

Le présent arrêt en est une belle illustration puisque la Cour de cassation considère que le non-paiement, pendant plusieurs années, de temps de travail du salarié n'est pas suffisamment grave dès lors que le salarié n'avait pas contesté sa rémunération pendant plusieurs années.

Il n'existe aujourd'hui quasiment plus de circonstances permettant d'entretenir l'espoir raisonnable de voir mettre à la charge de l'employeur les conséquences d'une prise d'acte de la rupture du contrat de travail d'un salarié, même en présence de manquements essentiels comme celui du paiement du salaire.

jeudi, 10 mars 2011

heures supplémentaires, résiliation judiciaire et conséquences

Cour de cassation- chambre sociale - 20 octobre 2010

Cet arrêt qui ne recèle aucune solution véritablement nouvelle, a le mérite d'illustrer un cas relativement typique de contentieux du paiement des heures supplémentaires et de ses conséquences.

Un salarié se plaignait de ce qu'il n'avait pas été rémunéré des heures supplémentaires qu'il avait réalisé. Il saisit le Conseil des Prudhommes pour obtenir non seulement paiement de ces heures mais également résiliation judiciaire du contrat de travail.

La Cour de cassation approuve les juges du fonds d'avoir accueilli sa demande.

Elle refuse d'abord de suivre l'employeur qui exigeait que le salarié démontre que les heures supplémentaires lui avaient été demandées par son employeur. Elle énonce au contraire qu'il revient à l'employeur, pour être déchargé du paiement des heures, de prouver que les heures avaient été effectuées contre sa volonté, ce qui est autrement plus difficile.

La Cour de cassation approuve ensuite les juges du fond d'avoir prononcé la résiliation judiciaire du contrat aux torts de l'employeur à raison du non-paiement des heures supplémentaires. Elle s'en remet à l'appréciation des juges du fond quant à la gravité du manquement qui portait sur un peu plus de 6 000 € d'heures supplémentaires.

Le seul moyen sur lequel l'arrêt de Cour d'appel est cassé est relatif aux conséquences de cette résiliation judiciaire, qui, puisque prononcée aux torts de l'employeur, est censée entrainer les mêmes conséquences qu'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La Cour de cassation refuse cependant que l'employeur soit condamné pour non-respect de la procédure de licenciement (condamnation qui s'ajoute à celle de l'absence de cause réelle et sérieuse dans les entreprise de moins de onze salariés ou pour les salariés ayant moins de deux ans d'ancienneté).