Blog de Me Antoine BON, Avocat, Strasbourg. Informations et débats autour du droit du travail : réglementation, embauche, exécution, conditions de travail, santé au travail, harcèlement, salaire, temps de travail, heures supplémentaires, licenciement, prise d'acte de la rupture du contrat de travail, contrats précaires, CDD, CDI, intérim, requalification, procédure prud'hommale... 5 allée d'Helsinki 67300 SCHILTIGHEIM - 03 90 20 81 40

Aller au contenu | Aller au menu | Aller à la recherche

Mot-clé - contrat précaire

Fil des billets

mardi, 9 avril 2013

Attention, si tu vas au tribunal... je romps ton contrat précaire !

Cour de cassation - chambre sociale -6 février 2013 et du même jour

La Cour de cassation se prononce à nouveau sur le traitement judiciaire d'une rupture de contrat à l'initiative de l'employeur que les salariés contestaient au motif qu'elle faisait suite à une action en justice de leur part.

Elle confirme que s'il est prouvé que la rupture est une mesure de rétorsion suite à une action en justice, la rupture est nulle pour violation du droit fondamental du salarié de porter en justice ses réclamations contre son employeur.

Le juge des référés peut même ordonner la réintégration des salariés dans leur emploi.

Le premier arrêt est interessant en ce qu'il vient préciser le régime de la preuve.

La Cour d'appel avait débouté plusieurs salariés au motif qu'ils ne rapportaient pas la preuve de ce que la rupture était liée à leur saisine des juridictions. La Cour de cassation casse les arrêts de la Cour en énoncant que lorsque la rupture des contrats, en l'espèce précaires, était intervenu hors des cas prévus par la loi, il revient à l'employeur d'établir que sa décision était justifiée par des éléments étrangers à toute volonté de sanctionner l'exercice, par les salariés, de leur droit d'agir en justice.

Certe cette décision intervient dans un cas particulier de rupture de contrats précaires avant leur terme sans que soit allégué de faute grave ou de force majeure. Il serait intéressant de savoir si la Cour de cassation prendra ou non la même décision lors de ruptures de contrats à durée indéterminées par exemple ou dans des hypothèses dans lesquelles un cas légal est formellement mis en avant dans la décision de rupture.

Le deuxième arrêt est également intéressant puisqu'il intervient pour un des salariés précaires se trouvant dans la même situation mais qui n'avait attaqué que l'entreprise utilisatrice et pas l'entreprise d'intérim, option qui lui est ouverte depuis longtemps par la jurisprudence .

La Cour précise que si seule les conditions de rupture sont critiquées, il faut nécessairement attraire l'entreprise de travail temporaire et non la seule entreprise utilisatrice car l'auteur de la rupture doit pouvoir être entendu dans la cause afin de présenter sa défense.

lundi, 22 octobre 2012

Salariés précaires : il ne vous reste plus que quelques mois pour agir !

Cour de cassation - chambre sociale - 19 septembre 2012

Cet arrêt est tout d'abord l'occasion pour la Cour de cassation de confirmer une jurisprudence bien établie en présence du recours réguliers de CDD pour pourvoir un même poste dans l'entreprise pendant une longue période.

En l'espèce il s'agissait d'un salarié précaire régulièrement employé au service expédition d'un journal régional pendant douze années.

La Cour saisit l'occasion de confirmer que la durée de recours à cet employé pouvait suffire à la Cour d'appel pour procéder à la requalification sans avoir à se pencher sur chaque motif de recours.

Elle confirme également que dans un tel cas le salarié précaire peut également réclamer paiement de son salaire pendant les périodes intercalaires sans emploi, sans que puisse y faire obstacle le fait qu'il percevait une indemnisation chomage pendant cette période.

La cour de cassation approuve ainsi la Cour d'appel d'avoir procédé à ces rappels de salaire au seul motif que le salarié, qui travaillait pratiquement à plein temps pour le compte de l'entreprise lorsque celle-ci recourait à ses services, était appelé inopinément par celle-ci pour faire face à un travail, de sorte qu'il se devait d'être à la disposition permanente de l'employeur, sans pouvoir prévoir ses plages de liberté.

L'arrêt est enfin et surtout notable en ce qu'il exprime pour la première fois clairement l'application dans le temps de la modification du régime de la prescription applicable à l'action en requalification qu'ont parfois du mal à appliquer les juridictions du fond (ceux qui me lisent près de chez moi sauront vers qui se tourne mon regard...).

En effet l'action en requalification se prescrivait antérieurement par trente ans. Depuis le 18 juin 2008, est entré en vigueur une loi (précisément l'article 26-II de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 modifiant l'article 2224 du code civil) réduisant la quasi totalité des prescriptions à cinq ans. En l'occurence l'action en requalification est passé d'un régime de prescription trentenaire à un régime quinquénal. Cette loi n'a cependant pu jouer que pour l'avenir et n'a pas eu pour effet de prescrire les actions des salariés précaires embauchés antérieurement mais uniquement de réduire à cinq ans les prescriptions en cours à compter du 18 juin 2008. Ainsi en pratique les actions en requalification de tout contrat précaire conclu entre le 18 juin 1983 et le 18 juin 2008 ne seront prescrites qu'à compter du 18 juin 2013.

Il reste donc encore quelques mois aux salariés précaires concernés pour saisir les juridictions prudhomales, car passé le 18 juin 2013, seuls les contrats postérieurs au 18 juin 2008 pourront être requalifiés.

La Cour précise par ailleurs expressément que même pour les demandes de rappel de salaire (qui ont toujours été soumise à une prescription de cinq ans) la prescriptions portant sur certaines périodes n'empêche pas la possibilité de réclamer pour les périodes non prescrites les effets de l'ancienneté attachés à une période prescrite, par exemple s'agissant de prime d'ancienneté, de préavis ou d'indemnité de licenciement indexées sur l'ancienneté.

lundi, 10 septembre 2012

Contrats précaires entrecoupés de périodes de carence : une seule requalification est possible...

Cour de cassation - chambre sociale - 10 mai 2012

Cet arrêt tranche enfin de façon explicite un problème récurrent en présence d'action de requalifications portant sur de nombreux contrats précaires discontinus.

La Cour de cassation a en effet toujours considéré que si plusieurs contrats précaires se succèdent, les contrats devaient être requalifiés en un seul contrat à durée indéterminée, entrainant condamnation de l'employeur à une seule indemnité de requalification et une seule indemnisation de la rupture.

Cette solution est cependant critiquable lorsque la relation entre l'employeur et le salarié précaire est interrompue pendant plusieurs semaines, mois, voire années.

Il est en effet difficile de considérer qu'il s'agissait d'un seul contrat de travail à durée indéterminée dont l'exécution aurait été suspendue pendant de longues périodes.

C'est pourtant cette vision qu'affirme l'arrêt du 10 mai 2012 qui concerne un salarié intérimaire ayant conclu une succession de contrats de mission d'avril 1995 au 31 juillet 1998, puis de mai 2000 à mars 2002 et enfin d'avril 2003 à juin 2007.

La Cour de cassation confirme la Cour d'appel qui a refusé de considérer qu'il y avait trois contrats à durée indéterminée et n'a condamné l'entreprise utilisatrice qu'à une seul indemnité de requalification et une seul indemnité de rupture et de préavis.

Par contre le salarié peut toujours tenter d'obtenir indemnisation pour le salaire non versé pendant les périodes intercalaires. Cependant pour cela il faut qu'il apporte la preuve qu'il se tenait à la disposition de l'employeur, ce qui reste problématique puisqu'on imagine mal qu'un intérimaire non employé pendant deux ans ne trouve pas d'autres missions chez d'autres employeurs.

Cet arrêt constitue donc un des rares exemple de solution défavorable au salarié en matière de contrat précaire.

vendredi, 7 septembre 2012

Requalifications de contrats précaires : dura lex sed lex

Cour de cassation - chambre sociale - 13 juin 2012

Cet arrêt rappelle à nouveau la sévérité de l'application des dispositions du code du travail qui font du travail précaire (CDD ou intérim) des contrats d'exception enfermés dans de strictes conditions de recours.

Il énonce d'une part que l'absence de production d'un contrat signé par le salarié précaire entraine la requalification sauf à prouver que le salarié a délibérément refusé de le signer dans le but de réclamer la requalification.

D'autre part, il énonce que, quelque soit le motif de recours aux contrats précaires, l'entreprise utilisatrice d'un travailleur intérimaire ne peut l'affecter à un besoin structurel de son entreprise.

En l'espèce la Cour de cassation approuve la Cour d'appel d'avoir considéré qu'un salarié occupé pendant quatre années au même poste de manutentionnaire-agent de propreté par divers contrats intérimaires occupe nécessairement un emploi permanent dans l'entreprise.

samedi, 5 novembre 2011

L'indemnité de précarité peut être due en cas de contrat précaire d'usage

Cour de cassation - chambre sociale - 28 septembre 2011

Cet arrêt constitue un nouvel exemple des conséquences parfois inattendues de la requalification de contrats précaires.

Après avoir occupé la fonction de maître d’hôtel pour deux sociétés, au moyen respectivement de 310 et 126 contrats à durée déterminée, elle a saisi les juridictions du travail d'une action en requalification.

Elle obtint gain de cause sur la requalification mais fut débouté d'une demande accessoire tendant à lui voir reconnaître le droit à une indemnité de précarité pour chacun des contrats passés.

En effet l’hôtellerie-restauration est un secteur où le recours aux contrats précaire est autorisé à titre d'usage et n’entraîne pas versement de l'indemnité de précarité de 10%, en application de l'article L 1243-10 du code du travail

Appliquant une logique juridique implacable, la chambre sociale constate que si les contrats précaires d'usage sont dispensés d'indemnité de précarité, ce n'est qu'à condition qu'ils soient régulièrement conclus.

Dès lors en cas de requalification, une indemnité de précarité peut être réclamée, soit une indemnité égale à 10% des salaires perçus par le salarié.

- page 1 de 3