Blog de Me Antoine BON, Avocat, Strasbourg. Informations et débats autour du droit du travail : réglementation, embauche, exécution, conditions de travail, santé au travail, harcèlement, salaire, temps de travail, heures supplémentaires, licenciement, prise d'acte de la rupture du contrat de travail, contrats précaires, CDD, CDI, intérim, requalification, procédure prud'hommale... 5 allée d'Helsinki 67300 SCHILTIGHEIM - 03 90 20 81 40

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vendredi, 6 avril 2018

La Cour de cassation fait le point sur le statut de journaliste pigiste

Cour de cassation - chambre sociale - 31 janvier 2018
Cour de cassation - chambre sociale - 18 janvier 2018
Cour de cassation - chambre sociale - 21 septembre 2017

Ces trois arrêts ont été rendus à peu de temps d'intervalle et permettent de synthétiser la position de la Cour de cassation sur le statut des journalistes pigistes.

Malgré un certain flou entretenu par les professionnels du secteur, le journaliste pigiste ne dispose pas d'un statut juridique externe aux concepts du droit du travail. Il est donc concerné par les catégories juridiques classiques que sont les notions de contrat de travail, de caractère à durée déterminée ou non de son contrat, de temps de travail, de rupture du contrat de travail.

Les spécificités du métier, à savoir le caractère intermittent et fluctuant du travail fourni et sa relative indépendance le rendent cependant difficile à classer dans les catégories classiques du droit du travail.

Par ces arrêts, la Cour de cassation rappelle les principes suivants :

  • le contrat liant le journaliste à l'entreprise d'édition est présumé être un contrat de travail,
  • ce contrat de travail est présumé être un CDI, sauf recours à un cas légal de contrat précaire,
  • l'interruption des commandes, même pendant une longue période ne met pas fin au contrat de travail,
  • le contrat n'est pas présumé être à temps plein, sauf preuve que le salarié ne pouvait prévoir son rythme de travail et se tenait en permanence à la disposition de l'employeur,
  • l'employeur n'est pas tenu de garantir un niveau constant de travail au journaliste pigiste,
  • le journaliste pigiste a droit aux indemnités prévues par la convention collective des journalistes, mais sur la base des piges effectivement perçues, même si elles ont diminué

Si l'étude de ces arrêts permet de rassurer les journalistes pigistes sur leur droit à la reconnaissance d'un contrat de travail à durée indéterminée, il ouvre cependant la possibilité à l'employeur de diminuer les piges confiées avant de se séparer du salarié dans le but de diminuer l'indemnité due au moment de la rupture...

mardi, 9 août 2016

Le transfert du contrat de travail, nouvelle cause légitime de licenciement ?

Cour de cassation - chambre sociale - 1 juin 2016

Dans cet arrêt la Cour de cassation se penche sur une question, à ma connaissance inédite, et particulièrement délicate relative au transfert des contrats de travai....

Ces dispositions prévoient qu'en cas de transfert d'entreprise les contrats de travail sont automatiquement transférés au nouvel employeur sans autre modification que le changement d'employeur.

Qu'en est-il alors si le repreneur est situé dans une autre région, non couverte par une clause de mobilité opposable au salarié ?

L'application rigoureuse des principes de droit du travail conduirait à refuser que le changement de lieu de travail puisse être imposé au salarié (il s'agirait d'une modification de son contrat de travail) et qu'en cas de refus de ce dernier, l'employeur doivent disposer d'un motif légitime de licenciement distinct du refus du salarié.

Ainsi seul un repreneur en difficulté économique ou pouvant justifier que la suppression de la localisation du poste est nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité économique pourrait valablement rompre le contrat du salarié qui refuse de quitter sa région de travail habituelle.

La Cour de cassation adopte un raisonnement plus audacieux.

Elle reconnait que la modification du contrat ne peut être opposée au salarié, mais considère cependant comme légitime le licenciement faisant suite au refus du salarié de l'accepter.

La différence parait subtile, mais pour le salarié, un refus de la proposition de modification devient lourd de conséquence puisqu'il risque un licenciement.

La question demeure posée de savoir jusqu'où la Cour de cassation poussera son interprétation de cette nouvelle cause de licenciement.

En l'état elle apparaît cantonnée aux modifications de contrat de travail que le repreneur "n'est pas en mesure de maintenir", ce qui laisse une large marge d'interprétation ouverte à discussion.

mercredi, 9 juillet 2014

Le transfert du salarié : nouveau motif de remise en cause d'une convention de forfait !

Cour de cassation - chambre sociale - 15 mai 2014

Encore un nouvel arrêt visant à réduire le champ d'application des conventions de forfait.

La Chambre sociale se penche ici sur les conséquences du transfert du contrat de travail d'un salarié d'une société d'un groupe à sa filiale.

Le salarié était soumis à une convention de forfait valable et avait accepté le transfert à l'identique de son contrat de travail.

Après son licenciement il avait réclamé de son dernier employeur des heures supplémentaires sur le fondement de la remise en cause de sa convention de forfait.

La Cour d'appel l'avait débouté.

La Chambre sociale ne l'entend pas de cette oreille et casse l'arrêt, critiquant les juges d'appel de n'avoir pas vérifié que la société dans laquelle il était transféré relevait bien d'un accord collectif permettant la mise en place d'une convention de forfait.

L'attention des praticiens est ainsi attiré sur les conséquences qu'un transfert, automatique ou volontaire, du contrat de travail peut avoir sur la validité des clauses de son contrat...

lundi, 16 décembre 2013

L'employeur ne peut licencier un salarié en se substituant ainsi à une décision judiciaire sur la rupture

Cour de cassation - chambre sociale -9 octobre 2013

Dans les circonstances de l'espèce, un salarié précaire d'une société de production télévisuelle était en conflit afin d'obtenir la requalification de son statut précaire en contrat à durée indéterminée.

Suivant une jurisprudence de plus en plus constante, les juridictions du fond avaient fait droit à la demande de requalification au motif que le poste de régisseur occupé depuis plusieurs années constituait un poste permanent de la société de production.

Le jugement de première instance avait ainsi prononcé la requalification des contrats en CDI mais ne s'était pas prononcé sur la rupture ou la poursuite du contrat. Tout en faisant appel, le salarié souhaitait reprendre le travail mais les parties ne s'entendaient pas sur le salaire et le temps de travail du contrat qui devait se poursuivre, s'échangeant des projets de contrats contradictoires.

L'employeur avait fini par licencier le salarié, alors que l'appel était en cours, au motif qu'il ne voulait pas reprendre le travail aux conditions prévues par le jugement du Conseil.

La Cour d'appel n'avait rien trouvé à redire à l'attitude de l'employeur.

La Cour de cassation n'entend pas les choses de cette oreilles et reproche à la Cour d'appel de n'avoir pas vu dans l'attitude de l'employeur une atteinte au principe de l'égalité des armes tiré du droit à procès équitable prévu par les dispositions de l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme.

La Cour considère ainsi que l'employeur avait utilisé son pouvoir de licencier afin d'imposer au salarié sa propre solution dans le litige qui les opposait relativement à l'exécution du jugement du conseil de prud'hommes du 21 juillet 2011 sans attendre l'arrêt d'appel.

Ainsi il est donné une portée particulièrement large aux dispositions de la convention européenne des droits de l'homme, semblant ainsi interdire, en cas de saisine d'une juridiction sur l'appréciation d'une situation que l'employeur impose unilatéralement sa solution et prononce le licenciement.

Il sera intéressant de voir jusqu'où les juridictions du fonds appliqueront une telle solution.

lundi, 14 octobre 2013

Former le salarié, toujours tu devras...

Cour de cassation - chambre sociale - 5 juin 2013

Cet arrêt est passé relativement inaperçu car la lecture de son attendu ne semble que rappeler une évidence : au regard de l'article L 6321-1 du code du travail, l'employeur doit assurer l'adaptation des salariés à leur poste de travail et veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisation.

Il s'agissait en l'espèce d'un salarié sans formation embauché en qualité d'opérateur de ligne et formé par son employeur à ce poste. Il reprochait à son employeur de ne pas lui avoir fait bénéficier de formations particulières. L'employeur, soutenu par la Cour d'Appel considérait qu'embauché sans formation, il avait déjà été formé à son poste et que cela suffisait à épuiser l'obligation de formation qui pesait sur lui.

La Cour de cassation casse l'arrêt d'appel et retient au contraire que le salarié est fondé à réclamer indemnisation pour ne pas avoir fait bénéficier le salarié, pendant seize ans, dans le cadre du plan de formation, d'aucune formation lui permettant de maintenir sa capacité à occuper un emploi au regard de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations.

Ainsi la Cour de cassation pose dans le cadre de cet arrêt une obligation de formation non seulement sur le poste de travail du salarié, mais également quant à sa capacité à occuper un emploi au regard de l'évolution générale des emplois, des technologies et de l'organisation.

L'étendue de cette obligation de formation semble aller bien au delà de ce que l'on peut constater dans les entreprises aujourd'hui...

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