Blog de Me Antoine BON, Avocat, Strasbourg. Informations et débats autour du droit du travail : réglementation, embauche, exécution, conditions de travail, santé au travail, harcèlement, salaire, temps de travail, heures supplémentaires, licenciement, prise d'acte de la rupture du contrat de travail, contrats précaires, CDD, CDI, intérim, requalification, procédure prud'hommale... 5 allée d'Helsinki 67300 SCHILTIGHEIM - 03 90 20 81 40

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mardi, 31 mai 2016

CDD requalifiés : A quand remonte l'ancienneté ?

Cour de cassation - chambre sociale - 3 mai 2016

La construction prétorienne autour de la requalification des contrats précaires (CDD - intérim) ne cesse de se poursuivre et de se préciser.

Une des particularités de l'action en requalification est que le juge se trouve face à plusieurs contrats précaires dont certains peuvent être valables et d'autres non et qui ne se succèdent pas nécessairement immédiatement.

Depuis de nombreuses années, la Cour de cassation a posé le principe du refus des requalifications multiples : il n'y a pas autant de requalifications que de contrats précaires, mais une seule requalification en CDI de l'ensemble des contrats depuis le premier contrat irrégulier.

Cela permet d'éviter que chaque fin de contrat précaire puisse ouvrir droit à indemnisation, mais laisse en suspens le problème des périodes entre les contrats précaires. En effet, alors que le salarié ne travaillait pas pour son employeur, il devient, par l'effet de la requalification, couvert par un CDI pour ces périodes. Il peut donc réclamer paiement du salaire s'il prouve qu'il s'est tenu à la disposition de l'employeur.

Dans cet arrêt la Cour de cassation précise que même une interruption de deux années au sein des recours aux contrats précaires ne remet pas en cause ce principe.

Ainsi la Cour de cassation réaffirme qu'indépendamment de la durée de la période intercalaire, l'ancienneté du salarié doit remonter à l'engagement du salarié par le premier contrat précaire irrégulier.

mercredi, 9 septembre 2015

Tolérer des pratiques irrégulières, c'est prendre le risque de ne plus pouvoir les sanctionner

Cour de cassation - chambre sociale - 2 juillet 2015

Un cadre supérieur d'une société Pneumatique a été licencié pour falsification de notes de frais en vue d'obtenir des remboursements indus.

Dans une telle situation, on ne donnait pas cher de sa contestation du licenciement devant les juridictions prud'homales.

Et pourtant le licenciement est considéré sans cause réelle et sérieuse au motif que la pratique reprochée était connue de l'employeur, apparente, tolérée, portant sur des montants dérisoires et n'avait pas procuré d'enrichissement personnel au salarié.

En effet il s'agissait de factures de "petites buvettes" offertes aux clients, d'un montant inférieur à 50 € par mois que le salarié, ayant plus de vingt ans d'ancienneté, mentionnait de façon apparente à son employeur qui les remboursait sans sourciller.

En équité, la solution ne choque pas, elle est intéressante sur le plan des principes puisqu'elle permet de rappeler que le seul caractère frauduleux d'une pratique ne suffit pas pour légitimer un licenciement et que les juges ont toujours la possibilité (et le devoir) de prendre en compte les circonstances particulières des affaires qui leur sont soumises.

Il est donc dangereux de prendre des décisions en la matière sur la base de principes intangibles sans prendre en compte le contexte des faits en cause.

lundi, 22 octobre 2012

Salariés précaires : il ne vous reste plus que quelques mois pour agir !

Cour de cassation - chambre sociale - 19 septembre 2012

Cet arrêt est tout d'abord l'occasion pour la Cour de cassation de confirmer une jurisprudence bien établie en présence du recours réguliers de CDD pour pourvoir un même poste dans l'entreprise pendant une longue période.

En l'espèce il s'agissait d'un salarié précaire régulièrement employé au service expédition d'un journal régional pendant douze années.

La Cour saisit l'occasion de confirmer que la durée de recours à cet employé pouvait suffire à la Cour d'appel pour procéder à la requalification sans avoir à se pencher sur chaque motif de recours.

Elle confirme également que dans un tel cas le salarié précaire peut également réclamer paiement de son salaire pendant les périodes intercalaires sans emploi, sans que puisse y faire obstacle le fait qu'il percevait une indemnisation chomage pendant cette période.

La cour de cassation approuve ainsi la Cour d'appel d'avoir procédé à ces rappels de salaire au seul motif que le salarié, qui travaillait pratiquement à plein temps pour le compte de l'entreprise lorsque celle-ci recourait à ses services, était appelé inopinément par celle-ci pour faire face à un travail, de sorte qu'il se devait d'être à la disposition permanente de l'employeur, sans pouvoir prévoir ses plages de liberté.

L'arrêt est enfin et surtout notable en ce qu'il exprime pour la première fois clairement l'application dans le temps de la modification du régime de la prescription applicable à l'action en requalification qu'ont parfois du mal à appliquer les juridictions du fond (ceux qui me lisent près de chez moi sauront vers qui se tourne mon regard...).

En effet l'action en requalification se prescrivait antérieurement par trente ans. Depuis le 18 juin 2008, est entré en vigueur une loi (précisément l'article 26-II de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 modifiant l'article 2224 du code civil) réduisant la quasi totalité des prescriptions à cinq ans. En l'occurence l'action en requalification est passé d'un régime de prescription trentenaire à un régime quinquénal. Cette loi n'a cependant pu jouer que pour l'avenir et n'a pas eu pour effet de prescrire les actions des salariés précaires embauchés antérieurement mais uniquement de réduire à cinq ans les prescriptions en cours à compter du 18 juin 2008. Ainsi en pratique les actions en requalification de tout contrat précaire conclu entre le 18 juin 1983 et le 18 juin 2008 ne seront prescrites qu'à compter du 18 juin 2013.

Il reste donc encore quelques mois aux salariés précaires concernés pour saisir les juridictions prudhomales, car passé le 18 juin 2013, seuls les contrats postérieurs au 18 juin 2008 pourront être requalifiés.

La Cour précise par ailleurs expressément que même pour les demandes de rappel de salaire (qui ont toujours été soumise à une prescription de cinq ans) la prescriptions portant sur certaines périodes n'empêche pas la possibilité de réclamer pour les périodes non prescrites les effets de l'ancienneté attachés à une période prescrite, par exemple s'agissant de prime d'ancienneté, de préavis ou d'indemnité de licenciement indexées sur l'ancienneté.

lundi, 3 octobre 2011

Preuve de la reprise d'ancienneté

Cour de cassation - chambre sociale - 21 septembre 2011

Un employé de maison d'un chateau s'est vu licencié pour avoir colporté des rumeurs désobligeantes sur la vie privée du dirigeant de la société qui l'emploie à un ancien dirigeant en conflit avec celle-ci.

La Cour de cassation approuve le licenciement au motif qu'en agissant ainsi le salarié avait abusé de sa liberté d'expression.

Elle casse cependant l'arrêt de la Cour d'appel s'agissant d'une réclamation liée à l'ancienneté du salarié. Elle reproche à la Cour d'avoir refusé la reprise d'ancienneté en l'absence de mention dans son contrat de travail.

Elle rappelle en effet que la mention de l'ancienneté du salarié dans son bulletin de paie vaut présomption de reprise de cette ancienneté. Cette présomption ne peut être renversée que si l'employeur rapporte la preuve contraire.

En l'espèce l'absence de mention de la reprise dans le contrat de travail ne peut constituer une telle preuve.

lundi, 28 février 2011

Pas d'ancienneté au sein du groupe... sauf coemploi.

Cour de cassation - chambre sociale - 20 octobre 2010

Dans cet arrêt, antérieur à son arrêt du 19 janvier 2011 sur le motif économique de licenciement dans les groupes, la chambre sociale énonce que sauf situation de coemploi ou stipulation contractuelle expresse, les contrats de travail successifs avec plusieurs sociétés appartenant à un même groupe ne permettent pas au salarié de se prévaloir de l'ancienneté acquise dans l'une de ces sociétés,

Cette solution, respectueuse de l'autonomie de la personnalité morale des sociétés est également logique puisque sauf à ce que le groupe soit si intégré que l'on puisse y voire une situation de coemploi, les différentes sociétés d'un groupe demeurent autonome en matière de gestion du personnel et d'appréciation des critères professionnels du salariés.

Bien que les groupes aiment à vendre à leur nouvelles recrue leur entrée "dans le groupe", les salariés de filiales de groupe doivent garder à l'esprit que l'ancienneté acquise au sein d'une filiale n'est pas automatiquement conservée en cas d'embauche par une autre société du groupe.